Les tribunaux ont récemment eu une nouvelle occasion de se pencher sur un cas dit de « revenge porn », c’est-à-dire de vengeance pornographique.
C’est en général l’arme utilisée entre conjoints – officiels ou non – dont l’un ne supporte pas la rupture avec l’autre. La vengeance se matérialise alors par la publication sur le net de photos ou de vidéos de la personne visée dénudée, voire en situation plus ou moins cabreuses.
La chambre criminelle de la Cour de cassation avait eu dans le passé (16 mars 2016) à se prononcer sur des faits de ce genre, mais sur des bases pénales telles qu’elle n’avait pu que constater que, la personne photographiée ayant donné son consentement à l’être, l’article 226-1 du code pénal (publication d’image portant volontairement atteinte à l’intimité de la vie privée) ne pouvait s’appliquer (notre actualité du 18 mars 2016).
Entre temps, la loi pour une République numérique, du 7 octobre 2016 est intervenue pour renforcer l’arsenal pénal, insérant un article 226-2-1 au code pénal, sur lequel nous nous sommes penché (notre actualité du 4 avril 2017 : Le « revenge porn » dans la loi pour une République numérique) et qui en substance aggrave les peines prévues lorsque les contenus présentent un caractère sexuel, a fortiori lorsque la personne concernée n’a pas donné son accord pour la publication de ceux-ci : on passe alors d’un an à deux ans de prison et de 45 000 € à 60 000 € d’amende.
Le retour du revenge porn, au civil seulement
Cette fois-ci, c’est sur le plan civil que s’est porté le plaignant.
Ayant subi la rupture d’une « relation extra-conjugale« , la personne délaissée a usé et abusé « d’appels et de messages téléphoniques malveillants adressés à son épouse, sa soeur et lui-même, ainsi que de la diffusion de photographies le dévoilant dans son intimité » à des personnes de son entourage.
L’époux a donc fait assigner son ex-maîtresse devant le TGI de Bobigny, sur la base de l’article 9 du code civil (droit au respect de la vie privée).
Dans son jugement du 20 novembre 2018 (voir sur Legalis.net), le tribunal ne peut que constater l’atteinte à la vie privée de l’époux volage, ordonner la cessation de la diffusion des images et condamner l’ex-maîtresse à 800 € de dommages-intérêts ainsi qu’aux dépens (frais de justice).
Dans cette décision, on n’a pas eu à mettre en œuvre le nouveau dispositif pénal visé ci-dessus. Le plaignant n’a apparemment pas souhaité porter l’affaire au pénal – ce qui n’arrange pas forcément les affaires de la victime, une indemnisation étant souvent préférable, au civil donc (il avait demandé 4 000 € pour préjudice moral), à une condamnation pénale qui ne rapporte, en cas d’amende, qu’au Trésor public.
Photo : Envato