Le 12 septembre dernier, un arrêt de la Cour de cassation a permis de rappeler la frontière entre propos tenus publiquement ou en privé sur un réseau social, en l’occurrence Facebook.
Les faits
Une employée a été licenciée pour faute grave pour les propos « injurieux et humiliants à l’encontre de son employeur » qu’elle avait tenus sur son compte Facebook en privé, au motif, selon les premiers juges, que « tous propos sur Facebook font partie du domaine public« .
Cette dame ayant contesté son licenciement, l’affaire est montée des prud’hommes jusqu’à la chambre sociale de la Cour de cassation qui a considéré que le licenciement était dépourvu que cause réelle et sérieuse.
Pour trancher en ce sens, la Cour relève que les propos « n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de quatorze personnes« . C’est ce faible nombre de personnes, dûment agréées par la titulaire du compte, qui retire le caractère « public » aux propos ainsi postés.
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Notion de groupe fermé
En d’autres termes, tout se passe, dans un groupe fermé d' »amis », comme si on tenait une conversation dans un salon, entre amis. De sorte que les injures et propos orduriers, ne pouvaient être considérés comme tenus publiquement.
La notion de « groupe fermé » ne saurait à elle seule suffire pour exclure la qualification de propos publics. Au-delà d’un certain nombre de membres, la notion de privé fait défaut.
Question de nombre et d’agrément
Cependant, la notion de « groupe fermé » ne saurait à elle seule suffire pour exclure la qualification de propos publics. Tout dépend aussi du nombre de membres de ce groupe.
De même s’il s’agit d’un groupe sur lequel aucune mesure de vérification de l’identité des personnes n’est prise pour admettre de nouveaux membres, il est permis de penser que le groupe est plutôt un moulin dans lequel tout le monde peut entrer, ce qui entache sérieusement la notion de « fermé » ou de « privé ».
Nous avons ainsi eu à intervenir auprès d’un groupe fermé de professionnels sur Facebook pour le compte d’une entreprise qui avait été dénigrée par ses salariés sur ce groupe. Celui-ci comportait quelque 23 000 membres… De plus, pour contacter les responsables du groupe, nous nous y sommes inscrits et personne ne nous a demandé si nous étions membres de la profession pour laquelle le groupe avait été spécialement créé. Il nous fut dès lors facile d’invoquer le caractère public de ce groupe, bien que « fermé », vu le nombre de membres et le manque de contrôle pour l’accueil de nouveaux membres. Pour ce faire, nous nous sommes appuyés sur une jurisprudence constante qui considère qu’au-delà d’un certain nombre de membres, la notion de privé fait défaut.
Voir l’arrêt de la Cour de cassation du 12 septembre 2018 sur Légifrance.
Illustration : Envato (DR)