Alors que le droit au déréférencement s’est installé depuis plus d’un an avec fracas au sein de l’Union européenne, sous les coups de boutoir conjoints de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE – arrêt du 13 mai 2014) et du G29 en tête duquel figure la Cnil, dont la présidente préside également ce groupe des autorités de protection en Europe, prévu l’article 29 de la directive sur les protection des données personnelles (lignes directrices publiées en novembre 2014, notamment), et que la question se repose de déréférencer autant sur les plateformes des moteurs de recherche européennes, mais aussi partout dans le monde, le même droit semble susciter bien des envies de la part des citoyens américains.
Quelques jalons essentiels
Le 13 mai 2014, la cour de justice de l’Union européenne rendait un arrêt rappelant que les lois européennes protégeaient les ressortissants des pays de l’Union, et que ceux-ci devaient notamment bénéficier de la protection des données personnelles les concernant face à n’importe quel traitement de données, notamment celui réalisé par les moteurs de recherche sur internet. Ainsi était affirmé le droit dit « à l’oubli« , plus justement rebaptisé « droit au déréférencement« .
L’arrêt posait ainsi une règle générale censée protéger tout ressortissant de l’Union, implicitement où que ce soit. Cet aspect juridique de la décision est d’autant plus évident que sous un angle non juridique, chacun sait qu’internet contribue à créer le fameux village planétaire dont on nous a rebattu les oreilles lors de la ruée d’internet en Europe dans les années 1994-95.
Mais voila que cette solution, évidente de notre point de vue (au point que nous l’avons signalée dès le 17 juin 2014 sur notre site principal), semblait choquer les gestionnaires de Google qui immédiatement décidèrent de ne procéder au déréférencement que sur les plateformes européennes du moteur. Ce qui constituait une interprétation abusivement restrictive de l’arrêt de la CJUE.
Là-dessus le G29 publie son « interprétation » de l’arrêt en question le 26 novembre 2014 (notre actualité du 9 décembre 2014), précisant, ainsi que nous l’avions signalé, qu’aucune restriction ne pouvait être pratiquée : un citoyen européen est protégé ou ne l’est pas ; il ne saurait y avoir de demi-mesure consistant à masquer des résultats préjudiciables sur google.fr mais pas sur google.com, que tout un chacun peut consulter depuis la France…
Il a donc fallu attendre le mois de mai 2015, soit une année après la décision de la Cour, pour que la présidente de la Cnil mette officiellement Google en demeure de déréférencer des résultats non pertinents sur toutes les plateformes du moteur, y compris google.com.
L’affaire en est là actuellement, après que Google France ait demandé un délai supplémentaire à la mise en demeure pour étudier les conséquences d’une telle demande (notre actualité du 13 juillet). Rappelons qu’en cas de refus d’obtempérer, la Cnil pourrait prononcer de lourdes sanctions pécuniaires contre Google, voire traduire la société en justice, au pénal, puisque toute entrave à la loi Informatique, fichiers et libertés ou à ses homologues des autres États européens constituent des infractions pénales.
Action aux États-Unis
Il se trouve que tout ce mouvement en faveur de la protection des citoyens sur leur vie privée est regardé avec envie outre-Atlantique. Nous l’évoquerons dans notre prochaine billet.